Mallarmé
« le mot reste toujours la trace affaiblie d’une expérience qui échappe »
Villon
Dans sa chanson il dit lassus Villon François de son nom
lassu
las
là
là-haut
Au dessus de sa prison il s’est juré il s’est emparé des trucs-mots
Au dessus de sa prison il s’est laché
il s’est emparé d’une étoile sur son front
frottée
contre les barreaux de sa prison
nous vieillirons dans sa bouche
La mer Baltique
J’ai dégagé la route des incertitudes. Au seuil de cette route, mon pied, à demi sur le bitume des abîmes. J’ai dégagé tout ce que je pouvais. J’ai essuyé les bords de mes mains (elles ne savent plus rien). Je sais maintenant quelle est la couleur du monde et puis celle de mes yeux. Il n’y a plus de larmes de sang, il ne reste que la combat contre ma mémoire, mais je sais, qu’elle l’a déjà perdu, cette salope résiduelle.
A l’aube, quand la dureté du jour est presque étrangère, j’ai balayé. J’ai nettoyé le cosmos en mettant la veste du multiple. C’est à l’aube que le risque s’égare dans l’air. C’est à l’aube que je l’ai vu. Cette étrangère, cette poésie.
Universellement j’habite toutes les maisons et appartements, taudis et cliniques psychiatriques, tentes et bateau voguant sur la mer Baltique.
Désormais je suis certain des maux de ma bouche, désormais je suis avide de la renversée radicale. De la soudaine apparition de l’ouverture.
C’est mon aube, je vis et je suis pur.
Exégèse
La vie des frères Barkroot, précieuse partie des Vies minuscules de Pierre Michon, en ce livre le soleil du style, comme partout dans les michonneries, rappelle par ses rayons dardant notre sentiment confus au vu de l’image exquise, vouée à disparaître aussi vite qu’elle fait l’effet du couteau dans le cœur ou l’explosion l’orgasme, à la lecture d’une phrase ponctuée comme on crucifie le syntagme sur la croix qui vibre du génie, rappelle que la poésie n’est pas un récit secret mais bien la vie, la personnalité d’un écrivain. Michon personnage distribué. Comme un théâtre avec une unique mise en scène un unique personnage, un unique Dieu.
Nous avons retenu à tout hasard cette prophétie, pour paraphraser Drieu La Rochelle. L’énigme est la totalité, Roland Bakroot cessera le ménage avec ses antiques vers latins, oubliera ses dents cassées, mais pourtant ne pourra que feindre d’oublier la figure d’Achille, son professeur. L’énigme c’est la façon de faire avec nous, pour nous. Pour tous le possible que la vie engendre des enfants lecteurs et qui pourraient accéder à cette nouvelle de Pierre Michon. Totalité d’un Éden perdu où tout le monde sentirait le corps de l’auteur au plus profond de son cœur lui-même. Énigme car le bleu du ciel ou la senteur d’un champs labourés ne remettent toujours qu’à eux-mêmes, sans que nous ayons à leur crier dessus,
leur évidence.
De tirer à l’arc sachant qu’il n’y a aucune cible, l’arc est le style, la flèche est Roland Bakroot et la cible les marcheurs de montagnes errants dans les livres que nous chérissons.
La vie est truffé de frères, de créatures mobiles, de démence. Roland Bakroot et ses collections de livres n’en fréquentera ni les premiers ni les secondes peut-être les troisième ? Qui sait ? Tite-Live pourrait bien le décrocher de la branche ?... Il ne jalousera pourtant rien. Il vivre une existence alerte comme le vieux Achille, son professeur de latin, vieux, chahuté, c’est-à-dire au plus près de la fleur du monde. La poésie.
Et je l’envie
Merci patron
Il est là Bernard Arnault, il me voit, il à l’air gentil Bernard Arnault, Il me regarde droit dans mes yeux, il est beau, il est debout, il a les mains dans ses poches, il me fixe, il me perce les yeux, il est gentil Bernard Arnault, il ne se retourne pas Bernard Arnault, non il ne se retourne pas, il fixe mes yeux, il voit que je suis une forêt, en me fixant comme ça, il rentre peu à peu dans la forêt, il entre dans la forêt Bernard Arnault, dans la forêt il aime bien, il trouve ça beau et gentil, il me le dit en regardant le ciel, il aime bien oui, il monte à un arbre et attrape une liane, il est nu, il est beau, il part sur sa droite Bernard, il part sur sa droite et hop il attrape une autre liane en criant des pourcentages du CAC 40, il part là sur sa gauche Bernard, il crie encore, moi je le guide à l’intérieur de la forêt, je respire, je respire en le guidant, il crie, il crie, il saute de liane en liane, il est fort Bernard, oui il est très fort, y’a son zizi qui se dodeline de gauche à droite, de haut en bas, il est beau comme Tarzan, il est gentil dans la nature comme Tarzan, il me crie de ne pas m’inquiéter de ses cris, que c’est normal de crier des noms d’actions dans une forêt et de se lancer de lianes en lianes, il arrive à la bordure de la forêt, il ne crie plus, non, il à l’air comme hébété devant la plaine qui se montre, il me regarde dans le ciel, je le regarde, il a l’air perdu Bernard Arnault, il me dit en chuchotant des choses que je ne comprends pas, c’est nécessaire chez lui, maintenant que je le connais, de dire des choses quand il ne comprends pas, quand il ne connaît pas Bernard Arnault, il respire un grand coup Bernard Arnault, puis il va dans la plaine, moi je le vois marcher sur le bras de la dame à côté de moi, il cherche quelque chose Bernard Arnault, je le vois, je ne peux plus lui parler à Bernard Arnault, maintenant il est dans la paume de cette dame, je monte un peu les yeux, je vois que la dame, elle est grosse, qu’elle a les yeux rougit, je ne sais pas pourquoi, je regarde le petit Bernard Arnault dans la paume de la dame, puis je regarde bien et je vois que au milieu de la plaine sauvage il y a un bâtiment, je regarde à nouveau la madame, elle pleure, ça coule, ça coule sur son visage de dame avec les cheveux teints en rouge et le gros ventre, Bernard Arnault il arrive au bâtiment, il est dans la dame, mais dans le même temps il est dans la paume de la dame c’est étrange, c’est comme s’il connaissait en même temps le gros corps de la dame et en même temps ce qu’elle pense la dame, il voit les fenêtres cassées, je vois le tout petit bâtiment dans la paume, la dame elle pleure toujours, je regarde le bâtiment et je vois écris ECCE, le bâtiment c’est une usine que je me dis, une usine de Poix-Du-Nord, je vois Bernard qui rentre, je ne le vois plus, je suis inquiet pour lui, je détourne le regard envahit par le chagrin, je crois que Bernard il ne ressortira plus.
Des années plus tard
On est encore
Rentré dans mes yeux
Et on m’a dit
Que Bernard
Il était mort
Et moi
J’ai pleuré
Mais en même temps
Je me suis dit
Que tout ça
C’est compliqué
Je me suis dit
Que Bernard Arnault
Il choisissait
Ce qu’il faisait
En fonction de critères
Inconnus pour moi
Définitivement
Inconnus…
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je ne veux pas que tu me meures
je ne veux pas mourir dans toi comme ça
je ne veux pas que tu me fasses la nuit
je ne veux pas finir dans ton corps
que je ne sois plus là où tu as envie dans tes pensées
ne me meurs pas
ne me fais pas nuit
fais autre chose que ce qui vient
fais quelque chose d’autre que ma mort
ne me meures pas
Et j'en crève
que pense le poème ?
le poème a chez lui, dans la maison qu’il n’ignore pas
une pensée et le poème dit le mot en forçant la pensée
déchiffrant les hiéroglyphes de la nature
il a de ça
il y a de la présence au monde un peu plus qui pousse
lorsque le poème s’émet
le poème pense tous les jours
mais lorsque sa vie prend fin, le soir quand je commence à boire
il ne pense plus
il ne force plus rien
il s’absente
et j’en crève
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j’y suis dans ce moment de fraîcheur
inconnu dans la ville
sûrement personne ne croit en moi
j’y suis pour de bon
la piel s’est raffermi
un son aux airs de déesses
tulipe fraichement coupé herbe mon cœur
poème animaliste
tu as les traits
tirés par le métal
tu es notre matière
notre pain
notre vin
toi à qui la parole s’est perdue
ne l’ignorant pas
la perte est devenue matrice
il va de soi que tu es de l’ombre
de la terre
du nuage et de la pluie
pour nos cultures intérieures
tu es ce qui nous traverse
pour s’évanouir et reprendre
le lendemain
dans le miroir ton visage se reflète
et tu sèmes pour toi seul toute la souffrance
et dans le souffle après être découpé
il ne tombera plus qu’un reflet rouge
dans nos assiettes en argent
et dans celles-là
il n’y aura plus que notre visage de
reflété
tu vas dans le monde comme
nos nourrissons que nous chérissons
comme l’Idéal
tu as
le matin
le mal de la brûlure que le feu
comme le pleur infini d’un enfant
qui réveille en les mères que nous sommes
l’inaudible ou le presque silencieux qui hardiment
fait basculer la crainte en terreur
ce pleur
est pour nous le presqu’audible
mais que
par enjambement d’hypocrites salopards
nous comprenons sans juger et agir en conséquence
nous
qui avons le tribut du monde
animaux des animaux
et toi animal du rien
et pourtant tu consumes le vrai
tu consumes l’herbe et notre reflet
car oui
un jour
l’on te reconnaîtra dans ton feulement
comme origine
comme rune témoignant et du symbole
et du Soleil
et de tout
car tu viens vers nous
craintif ou reconnaissant
nos paroles s’adressent à toi
comme des
lames millénaires
que ne se sont jamais émoussées
même par la moindre syllabe d’une prière
et si
même
l’on avait inventé un son muet
qui te ferait signe
le reconnaître serait pour toi tâche
aberrante car nous ne sommes pas aptes
à donner le beau de ton silence
nous pouvons seulement
l’imposer
car la mort est le seul fruit du travail humain
À Faucher
une idée m’échappe
alors qu’elle me creuse
vous comprenez monsieur Faucher, en s’échappant l’idée a laissée quelque chose en moi, comme une trace.
mais pas une trace aride, une trace sèche… non
une trace fraîche et belle
un fragment
ce qui me frustre c’est de ne pas arriver à en faire quelque chose, un poème par exemple
ou, si j’écris un poème avec cette « creusée » ce sera un poème qui restera obscur pour les gens qui le liront et surtout pour moi
j’aimerais avoir les idées plus claires
en même temps lorsqu’on est poète est-ce bon d’avoir des idées en ordre ? ne faudrait-il pas plutôt être absent à la certitude afin de proposer aux gens qui lisent ce que l’on fait de se retrouver présent au poème, qu’ils ne « comprennent » pas le poème avec leur complexes d’idées
il faut laisser un « espace » aux lecteurs, ne pas être trop présent dans le poème
pour qu’ils le soient eux
une nouvelle voie à chaque poème
une nouvelle odeur de terre fraîche
une trace, une creusée dans la terre fraîche