Petit récit autobiographique
I.
Le premier souvenir c’est le micro tremblement de terre dans le lit de mes parents. Je devais avoir quatre ans. Je venais tôt, ils dormaient et je les réveillais. Si je compte bien ils devaient avoir 31 ans chacun, car ils sont nés la même année. Après, plus rien. Plus de souvenir de Rue de Sévigné. L’autre souvenir c’est ma grande chambre chez mon père au fond de l’appartement de la rue des Francs-Bourgeois. Et Charlie, un noir que papa avait recueilli pendant une semaine qui s’était transformé en 2 ans. J’adorais Charlie. Il jouait d’un instrument de son pays natal. Ça faisait des petits bruits métalliques. Un petit piano africain. Un jour le matin où j’allais réveiller Charlie dans sa petite chambrette en bas. Je vis pour la première fois une femme nue. C’est Virginie. Ils avaient baisé ensemble mais je ne le compris que bien plus tard. Là, c’était étrange, je ne savais pas vraiment pourquoi elle était nue dans son petit lit. Peut-être s’étaient-ils embrassés. Il y avait Gabriella qui était une architecte qui vivait avec papa, je ne me souviens plus bien d’elle. À 6 ans mon père tentât de m’apprendre à jouer aux échecs, je compris le mouvement des pièces mais pas la stratégie. Je bougeais une tour par ci par là et j’étais heureux. Pas de monstres. Pas de viol. Pas de problème de santé. Je vivais dans un bonheur calculable à hauteur du bonheur qu’un enfant peut espérer.
Un jour nous partîmes pour Cloyes, c’était la maison de campagne de la famille du côté de mon père. Il y avait quelque chose dedans, au-dedans de cette maison de l’ordre du parfait. Je me réveillais, je jouais à mes jeux vidéos, mon père e réveillait avec Gabriella, nous prenions le petit déjeuner. « mange antonin, le p’tit déj c’est important » disait mon père. Et je mangeais mes frosties en me disant que j’accomplissais une action héroïque.
II.
Chez ma mère c’était tout autre chose. Beaucoup d’amour. Beaucoup de protection. Beaucoup de viol par l’amour. Mais je l’aimais. Je l’aimais du plus profond de mon cœur. Et encore maintenant je suis comme l’enfant qu’elle violait d’amour. Attendant son amour partout et n’importe quand. Au téléphone, le matin, la nuit, la jambe cassé etc… Je dois dire que ma mère était une belle femme. Elle aussi avait des amants. Il y a eu Gilles, le photographe avec son voilier. Dominique, rencontré comme géo en Martinique qui préférait jouer avec moi à la Nes que de baiser ma mère. Jean-Henri qui la tabassait puis qui est mort d’un cancer. Il y a eu des films, des tournages. J’étais sous la protection de mon amoureuse Pauline, amour que je lui portais dont les prémisses auguraient le début de ma sexualité. C’était ma babysitteur. À qui ma mère avait demandé « Pourrais-tu nous accompagner en Espagne pour le tournage de l’Espadrille (téléfilm qu’elle abhorre désormais) ». Elle venait, elle était bien payée et m’achetait avec l’argent de la production des jouets dragon Ball z. « Prends le, Emmanuelle m’a dit que tu pouvais prendre tout ce qui te faisait plaisir ». L’Espadrillefinançait mes petits bonhommes Sangoku et Végéta.
Mon grand-père venait de mourir. J’ai encore soucis de lui dans mes rêves. Je me suis même tatoué sur mes phalanges son poète préféré. Je ne sais pourquoi je suis aussi spirituellement proche de lui. L’esquisse d’une réponse se trouverait dans la transmission par ma mère d’un deuil impossible. Ce ne serait pas inexact que de dire ça.