Le premier étage d’un immeuble de la rue des Grands Augustins
Une grande tour mais plutôt un point de vue ouvrant sur de
Grandes espérances : remplir par les mots
Les béants possibles de l’instant.
Une vision :
La fenêtre ouverte sur le passé,
Différents temps surpris par un futur qui n’est pas encore né : gît le prof de fac
À quelques mètres seulement.
Où, vitres closes, il écrit patiemment
Sur ce qui ressemble être un bureau, étroit, disposé entre le canapé
Et le mobilier de la cuisine.
Car je sais qu’à l’intérieur c’est comble, les copies des élèves lui imposent
Cette altérité qui jamais ne se rend : son fils et dans la salle de bain à droite
En caleçon ; jamais les lunettes du prof et le corps du fils
Ne seront des objets inclus en ce qui va de mon être.
Jamais.
Pourtant jamais ne périra en moi
Le goût d’être un autre.
Jamais car ces deux êtres sûrement purs en tous les cas par hypothèse
Me rendent à cette vision, ce flash
De l’autre que je ne fus jamais.
Celui-là qui s’imbibait de la nuit, prodige de la démence,
Influençant les différents temps,
Incomparables parmi les incomparables, l’autre que je connaissais
Et qui ne m’a pas laissé vivre.
Pourtant il est là, sur les grands murs blancs de cette cour. Son ombre
Le trahit.
Il est ici allongé sur le canapé non loin du prof de fac,
Désirant un père, désirant un petit-frère.
Désirant à jamais.
C’est là qu’est la beauté de la situation.
D’avoir aperçu, dans cette vulnérabilité et dans l’impermanence
De ma raison
Le paysage paisible d’une rassurante immanence
Embrasant d’un trait de feu ma mémoire :
Le souvenir de mon père, de Diego ;
De Marie et moi, enfant ivre,
Enfant heureux,
Enfant que je fus.