À Fanny G.
Il a changé
En briques
Des gens
Des maîtres
Des blouses
Des fous
Des morts
Il a changé
En tuiles
Des gens
Des érudits
Des lecteurs
Des fous
Des noirs
Il a changé
En meubles
Des mers
Des poèmes
Des amis
Des alcools
Il a changé
En lui
Des fous
Des croyants
Des blouses
Des personnes et
Des personnes
Il a changé et changé.
Ainsi il s’est fait
Architecte, Dieu,
Servile dans la prison de ses os,
Dans sa sombre maison bâtit par les mots qui signent l’étrangeté de l’habitude.
Pourtant, en l’espace haït des révélations, quelque chose s’est tu en lui-même
Fécondant le sacré du verbe
Cela était.
Je ne dirais quoi ou qui.
Mais tu le sais bien, oui,
Qu’est-ce ou qui.
Au creux de la cheminée, te souviens-tu de mes yeux ?
Lorsque à leur source,
Je jetais un filet dans la mer d’errance et que, sans fin je tentais de me venir en aide
Pêchant un poisson dans les rets d’une algue, puis m’en acquittant en le nommant
Le poisson du sens et du non-sens.
Il était,
Il était en nous.
Celle qui nait de savoir et meurt de vivre.
Celle-là n’était pas un poème,
Ni un jouet,
Elle était une distance sans point de départ ni d’arrivée.
Celle-là était
Celle-là était toi.
Elle était le Tu et le Je pourtant sans territoire, sans langage,
Sans jeu.
T’en rappelles-tu ?
Et te rappelles tu de nos amis communs ?
Et de ta peau tatouée
Et tatouée
Et béante
Cette surface même qui m’aidait à creuser en eux, fussent-t-ils chers à nos cœurs,
Leur ignorance en la marque du hasard dont l’art a le secret.
Anton, Julien et d’autres
Vénérant le manque que seuls
Celle-là qui meurt de vivre par ses yeux pendus à la connaissance de ce qu’est un hasard, une vie, une mort,
Celle-là qui en son espace
Est elle-même, identique et pourtant différente, énigmatiquement étrangère aux Concessions à la meute qui en elle distribue le réconfort attendu ;
Et celui-là qui n’écrit que dans le sentier étroit battu par elle,
Ces deux corps qui se suivent, propulsant le sens et le non-sens dans l’intime de leurs regards emprunts de douleurs de ne pouvoir se fixer, considèrent le manque comme absurdité.
Car ne participait au vide le monde, sauf eux.
Te rappelles-tu de nous au creux de la cheminée ?
Où tu ne me laissais aucunement te circonscrire dans le si peu
Ou dans le pas assez ?
Où tu ne me permettais pas de me faire
Architecte ou Dieu car pressée par la fertilité de la graine du lierre, de sa vélocité en sa génération,
Tu m’enjoignais à ne pas rebâtir mon entière prison d’os :
« Cela ne sert plus à rien, regarde ce lierre, il s’étend en l’air si vite,
Si magistralement, qu’il n’a pas besoin de tes doutes, de tes geôles
De ton corps, de tes os ; il grimpe vers le sens et le non-sens du secret. »
Cela je l’ai écouté.
Cela provenait de tes lèvres,
Et c’est cela qui m’a rendu étranger aux bruits rigides de mes os,
Car ton secret, en son voilement et son dévoilement m’a fait mieux considérer
Ce qui doit exister.
Et je n’entends désormais plus craquer de mille façons, de mille mots assourdissant cette prison,
À sa place j’y ai bâti un temple dont les fondations sont immémoriales et secrètes
Pleines de toi jusqu’à moi et de moi jusqu’à toi, de sens et de non-sens. De vie.
Ne reste que le végétal et son hasard ainsi que le principe de sa vie, son errance, et de sa mort, sa sincérité.
Choses que tu connais si bien.
Cela,
Je le sais.
Je n’écrirais désormais plus pour bâtir ce qui peut exister, mais pour me recomposer, tel le secret dans le secret de notre secret.
Antonin.