Brûle
La maison brûle
L’homme brûle dans la maison
Le chien brûle
Les enfants et la femme brûlent
Le jardin brûle les fontaines brûlent
Le temps brûle passé et futur brûlent
La duplicité brûle
La canette brûle
Le matin brûle
Pourquoi regarder sans cesse là où il n’y a rien à voir
Une voix
J’arrache la table et le stylo, la feuille -
Mes jambes et mes mains, mes yeux -
En les disant je me troue.
C’est ma parole, le corps de ma pensée, l’étoffe, la tessiture la matière
De mon esprit.
Je me troue comme une toiture d’une cabane de Soukkot -
à la lumière du soleil je brûle en parlant.
C’est un seul mot inintelligible et clair qui dure avant et après
Ma voix n’est pas l’ombre des objets
Le mot vite est crié puis immédiatement -
Il n’y a plus de vitesse que le présupposé de la vitesse.
Je démembre la terre et ses os, racines sobres contre à compter
Combien le temps est enclos dans les choses -
Et non les chevaux qui se lèchent interminablement le dos l’un de l’autre.
J’aère le salon puis immédiatement une odeur faible, esquinte l’air -
Du salon où -
Non.
Il n’y a rien à dire sinon porté pâle et haut, troquer, ma parole
La parole n’est pas à marchander, elle se colle amour dit l’autre lune à l’autre lune de la « Lune » fléchir grésiller déterrer amener réenterrer, le pain à la main,
La bouche ouverte la parole m’est apparu un jour comme un trou dans le monde
Fait par ma bouche humaine -
Et la pensée d’abord comme un creux, comme un coup de vide porté dans la matière.
Il n’existe pas de choses et la parole ne double pas un monde.
Anoushka ou comment elle m’est venue
Venue à ce point que -
Venue danse
Dans la phrase -
Un pas de deux
Anoushka -
Pour eux,
Anoushka -
Et,
En pure réalité -
Dans les larmes et l’amertume
D’une danse coupée -
Comme du papier.
Le ventre
Se dégonfle puis -
Se regonfle
La sordide exigence du multiple
Je n’en veux pas -
Disait la pensée.
Mais pensée n’est pas danse -
Et multipliée,
La pensée est consolatrice -
Pour elle -
Sans doute.
Note 2018
Dans la poésie ancienne le « tu » désignait la muse ou la bien-aimée pour qui était dit le poème ou adressé le poème.
Au XIXème le « tu » désignait l’auteur lui-même.
Pour Celan ce « tu » fût adressé à sa mère.
Aujourd’hui il désigne qui ? ce tu ?
Note
La sculpture est spatiale, la poésie temporelle
Note sur la respiration
le poéme refuse
(à moins que ce soit moi ?)
à laisser passer
par le trou que construit le langage
construit par le langage
tout ce qui faisait respiration
PENSÉE DE LA VIRULENCE
ce sol est friable
dans l’espoir de me remplir j’attends
le temps soutenu des rois
le temps qui se congestionne facilement
pour devenir désert de poésie
l’enfant de mes tristesses
toujours présent, il n’y aura pas d’achèvement
il est né sur le carrelage
il demeurera un écart entre le désir et la déception
dans les plis
un statut noir
Bongo
Les gestes
j’assiste la nuit
sur leurs genoux la bouche qui
se dilate
pour me dire combien
il y aurait d’engeance passable
dans la construction sans trous
de la question poétique
une idée serait de
Je suis la nuit
de ma chambre
la lucarne est une
canine noire
et ma peau brûle
en assistant
les serviteurs nombreux des langues
enfouis dans le noir
La dent naturelle
ses seins
une trompe
ma main
la pompe
un cristal blanc
qu’est l’aujourd’hui
l’œil violent
cils-symphonie
j’ai marché vers le préau loin
/Vu/ les canines des lycanthropes
un carnage se déploie dans leurs seins
l’hôpital congestionne la finitude et le bruit dans un seul syntagme :
les écailles
Quelqu’un tout contre
le sourire
un œil
et s’enracinent
encore
malgré le son
malgré tout ce qui décide
malgré tout ce qui fait jurisprudence
sur mon corps entier
ils s’évitent
et produisent
des déserts de pieds