Car exister est un secret
Une fine pluie au dehors
Gouttes, vent, triste bruit
Ajoute quelque chose à l’heure
Ne dormant pas je m’endors
Au réveil un sentiment vague
De ce qu’est ne pas vouloir
Et vouloir est assommant
Une fine pluie au dehors
Conjuguer l’espérance est violence
De pouvoir faire le tour du petit parc
Sans que la fine pluie m’endorme
Car exister est un secret
Ma grand-mère
Les tombes m’ont apprises
Tellement de marbre sur tant de vie
Retour ma grand-mère
Aux cheveux blonds-blancs
Apprenait l’hébreu
Avant de mourir
Alejandra Pizarnik
Dans l’espoir qu’un monde soit exhumé par le langage, quelqu’un (toi ?) chante le lieu où se forme le silence, et c’est pourquoi chaque mot que tu dis et en outre plus ce que je désire, et autre chose. Chaque mer que tu cherches m’oublie. Et chacune de mes oreilles de mendiant attendent que tu leur fasse naître des temples à l'intérieur d'elles. Parle moi plus fort et plus longtemps. Laisse moi te suivre dans le couloir où il fait froid, mon Alejandra
Ce qu’on peut préférer
Parfois il arrive que parfois il arrive qu’on n’aime pas les gens moches et qu’on aime les gens beaux, mais parfois seulement
Ma vie à 29 ans
Je m’éveillais le matin avec douleur, je vidais le petit cylindre de café puis ajoutais de l’eau chaude pour ensuite remettre du café et appuyer sur le petit bouton rouge.
J’attendais, comme un con, en regardant le grand HLM qui faisait face à ma cuisine. Parfois je me roulais ma clope pendant que le café se faisait, parfois non.
Allez savoir si le moment de rouler sa clope est le bon moment. Car pendant le café je courais le risque de devoir l’allumer, et c’était inévitable, je l'allumais si elle était prête. Et ce serait le début d’un matin râté. Ou alors j’attendais mollement, dans le coton que tout ça se finisse bien dans le salon.
Parfois il restait un peu de vin de la veille d’un dîner ou d’un apéritif. J’avais du mal à y renoncer et vers les coups de sept heures je buvais. Mais ça n’avait rien de très grave. C’était une sorte de maintien du vertige, la radicalité, l’étrangeté de l’alcoolisme.
Le matin très tôt la plupart du temps je lisais. Quoi ? Oh, de tout. Mais on y reviendra. Et je regardais des séries toutes les deux heures.
J’attendais les huit heure trente neuf heure pour réveiller Alexandra et lui amener du maté. (Qu’on appelait lors des moments de joie le matou-maté, on était quand même un peu con…)
J’avais 29 ans et une petite fille au compteur. J’étais une merde.
Ma vie avait réussi à me transformer en ogre de médicaments, du risperdal, de la quétiapine, du depakote, du valium, du prozac etc… Je faisais confiance à mon psychiatre et j’étais gros. Vale. On se souvient toujours des mouvements doux amer qu’après une trentaine d'années. Au bout de dix c’est encore notre vie, à vingt on l’oublie et à trente on est rattrapé par le game.
Le monde était entre Trump et Deng Xiaoping et moi je vivais une petite ville qui s’appelait Paris. Pour rendre justice à la vérité je précise que j’étais vers Place des Fêtes. J’étais un poète râté et ma vie n’était qu’une succession de petits plaisirs entre de plus gros malheurs.
J’avais tout le temps mal à la tête et écrivais comme un gros con, des trucs improbables. Je nageais dans la merde et les seules choses qui me faisaient encore ramer sur mon bateau gonflable c’était Allie, ma copine et ma fille Anoushka.
C’était une sorte de périple de tous les instants, du comique je passais au laid puis au tragique sans aucune entracte et se déversait la merde sur ma putain de tête tous les saints fucking jours de l’année.
Je fumais environ 40 cigarettes par jour pour respirer, ça m’aidait à tenir.
Mais pourquoi ?
Micro-sensation didactique (écoutez)
Chaque fois que j’y pense
Pensant je m’écroule
M’écroulant je survis
Et survivant je n’y pense plus
Le directeur de la FFF
La douce compréhension d’un système de douleur
Anoushka
J’aime ma fille comme un coin de vérité
Un texte
C’est un texte sans intention particulière, un texte qui va vers quelque chose que je ne sais pas, un texte qui marque l’absence d’un départ semblable à un axiome ou une idée. C’est un texte armé d’une volonté vide. Un texte sans détours ni ligne directrice. Un texte absent somme toute. Ainsi je peux commencer. Je suis là, à l’écrire, je veux dire le texte. Plutôt que la question du sens de ce texte qui a priori n’en a aucun hormis une volonté d’écrire, je me demande plutôt vers quoi ça va ?
Ça va vers lui-même comme texte écrit pour être lu, ça va vers l’autre. Ça va aussi vers moi. C’est un texte qui me questionne, qui me demande, qui me demande d’aller au plus profond de moi ma volonté, mon désir, la ligne directrice sur laquelle mon cerveau s'appesantit. Ça va vers le dehors. Le dehors de ma simple volonté. Ça va, comme je l’ai dit plus haut, vers l’altérité. Mais comprendra t elle ? Si j’écris ce texte c’est pour l’informer, non par démonstration mais par une question. Est-ce que l’autre va se réjouir du texte ? Est-ce que l’autre va relancer la balle ? Puisque ma volonté veut et mon vouloir veut ma volonté je suis enfermé. Donc le texte, on le voit commence à se dessiner. Ça va vers le dehors pour infirmer le dedans. Mon désir d’écrire ce texte est après qu’il soit fini. Mais maintenant il n’est pas fini. Il y a une étrangeté d’un texte qui n’en peut plus de ne plus finir et d’aller du dedans vers le dehors et du dehors vers le dedans. Ce texte est l’inscription sur une page quelconque qu’il n’y a pas d’issue à l’écriture. Tout est a priori dans la lecture et a posteriori dans l’écriture. Ça va vers ce paradoxe. Ce texte. C’est l’événement pur. Dans les conditions du monde qui entoure les différences de ce texte sont abolis car il n’y a pas de sens. Il n’y a que le lieu du non-sens. Un va et vient entre le monde et le texte. Un événement en tant qu’il change radicalement les possibilités de s’exprimer et d’être entendu à partir de rien et pour rien. C’est le niveau zéro. Ici il y a texte car il se surimpressionne à sa propre événementialité. Il y a un texte qui ne dit rien d’autre qu’il n’est que lui. Qu’il va. Mais où ? Et d’où ? Par où ? Vers quoi ?
Ce texte propose peut-être de savoir ce qu’est la poésie. Qui est elle-même l’antithèse du texte événementiel que j’écris. Mais la poésie, elle, peut être formelle mais jamais sans destinataire et jamais non plus sans volonté d’écrire. Sans sens ou absence de sens. Absence du rapport entre le texte, moi et le potentiel lecteur. J’informe juste du vide et me repose là-dessus pour expliquer ce en quoi consiste la poésie. Le texte est enveloppé dans lui-même. Il s’écrit s’écrivant. S’avançant avançant. Sans rien de volontaire sinon la déduction qui part d’une absence de principe pour qualifier la poésie. C’est cela peut-être où le texte voulait aller à mon insu. Mais j’avais déjà le savoir de l’insu dans mon absence de volonté car elle encadrait une certaine pudeur universalisable du savoir. Je savais déjà tout en ne sachant pas.
Le mont hétérologue
Je suis le souffrant, le souffrant. Celui qui souffre, qui est objet de souffrance. Qui en quelques situations est dans une situation de souffrance. Crever les yeux, crever le ventre, crever la vitre. Je veux crever la matrice de souffrance