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RÉFLÉCHI SUR LE LYRISME 

2 Mars 2020

 

La poésie contemporaine s’applique, par divers registres qui vont du néo-formalisme tarkossien à l’expression instantanée du présent qui se meut par et pour la conscience de l’instant ; mais pas du temps, ou en tout cas d’un travail à son encontre d’un Guillevic, à dématérialiser le pathétique du Moi. Le Moi qui se conscientise dans la forme grammaticale et poétique bien connu du Je. On sait que le lyrisme parcourt l’expérience poétique de toute part, dans le temps et dans l’espace du poème. Voyez l’expression, le ton d’un Vigny, d’un Lamartine ou d’un Hugo ; expression qui s’incarne le plus profondément et le plus véritablement (c’est à dire qui en a la conscience et le pouvoir d’accomplir le désir lyrique) dans le romantisme. Les contemporains ne se réclamant pas du lyrisme l’abhorrent par déconstruction plutôt que par instinct de rébellion contre l’ordre établi de la poésie romantique. Pennequin par exemple s’appliquera à utiliser le quelque chose plutôt que l’objet défini et donc perceptible à l’expérience subjective du Je pour et dans le vers. Il faut noter que le lyrisme a généré une immensité de recours au sujet disant : dans le surréalisme Eluard ou le Aragon du Fou d’Elsa applique consciencieusement la dialectique du rapport entre sujet lyrique et objet amoureux, qui ne peut s’exprimer (pour lui) que dans un excèdent du simple poème, c’est à dire la mise en danger de soi dans la première syllabe du syntagme « je suis à toi ».  Pour le surréalisme il ne peut exister que de poésie du Je qui noue l’abstraction de la conscience de son propre poème à la construction consciente et palpable du Moi ivre des méandres du Moi non-encore perçu comme Moi.          

 

Le multiple, le désincarné par une unité qui transcende le foisonnement de point de vue peut s’exprimer dans la poésie symboliste, ainsi, on note qu’un Rimbaud décrit la condition d’un garçon de dix-sept ans, par le on. Il est évident que le on s’inscrit dans une négation du point de vue, et, applique à la forme lyrique sa désincarnation, son diluement dans les multiplicités existentielles que Rimbaud connaît dans sa vie. Je n’est pas on mais il le décrit comme un courant qui passe entre le poète et sa représentation fantasmatique. Il vit dans le fantasme des bocks de limonade, il vit par la désincarnation de son personnage : c’est le le qui précède le vent plutôt que l’absorption poétique de la figure de la brise va sur le je. Le réel est décrit par l’imaginaire : l’irréel. On avance dans la poétisation de l’indéterminé par la subjectivité existentielle du jeune Rimbaud. Pour autant, ce jeune Rimbaud existe, architecte du plan construit pour le lecteur, pour qu’il s’y mêle et qu’il s’identifie au je de Rimbaud. Il désincarne pour s’incarner dans chaque lecteur. Le fictif (du on, du ce) se réalise dans la conversation avec le lecteur qui ne peut plus qu’incarner, vivre le poème, comme s’il était lui-même un jeune garçon de la fin du 19ème siècle, un Rimbaud qui s’évade, qui lutte et cri d’épouvante.

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