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Lyrine

13 Janvier 2020

Je ne puis que travailler dans le brouhaha. Je travaille dans les cafés les bars les troquets. Une femme s’assoit en face de moi

« Tu écris » dit-elle

« Oui »

Elle me demande de lui montrer mes poèmes les lit, et dans un geste rapide me les jette à la gueule.

« Tu n’écris pas ! »

« Oui » lui répondis-je.

« Je scripte. »

On monte chez moi et on baise. Elle jouit enfin au bout de trois quart d’heure de coït.

Je lui écris un poème à côté de la petite cheminée.

« Ça c’est mieux », il lui fallait attendre ce feu pour qu’elle s’intéresse à moi et pas à ma bite.

« Je crois pouvoir t’aider » dit-elle. « Et comment ? » répondais-je.

« En avalant » - « mais quoi ?! »

« Ton sperme pardi ! ». Alors là je captais que j’étais en face d’une vraie femme, pour moi le sperme est sans parole.

Elle se mit à me sucer sans relâche mais rien ne sortait. Rien de poétique.

Mais elle devenait ma femme suceuse à m’extraire du sperme de 8.6. Je suis tombé amoureux d’elle. Dès lors je n’avais plus besoin du brouhaha des cafés mais seulement de sa présence dans mon appartement, fantomatique, réelle, plus que réelle, celle qui aspirait par le moindre suçon ma vérité. Mon immanence dans ce monde où je vivais avec la 8.6 dès 9h30.

Celle qui ne vivait que par moi, m’admirait, me transperçait. Par la fenêtre il y avait quelques arbres adossés à du béton de sorte que je voyais plus le béton que les arbres. J’habitais dans une résidence place des fêtes. Elle s’appelait Lyrine. Nom qui trompait car elle n’avait rien d’une Lyrine, franchement plutôt d’une Estelle, Marie, Gaëlle.

Le matin avant qu’elle se réveille j’allais acheter des bières, elle était moi comme j’étais avec mes 8.6 à regarder le béton en lisant Madame Bovary. Je lus beaucoup. Mais je n’éjaculais pas, je tombais dans les ténèbres des contradictions. Espérer ? Non

« Je t’ai fait du café » me dit-elle. Je le buvais. Je buvais aussi ses paroles. Lyrine était ancienne professeur de français. Elle me racontait des contes étranges de Rabelais, je bouffais sa chatte. Elle ne s’épilait pas. Ça m’a toujours emmerdé les femmes qui ne s’épilent pas par ce que t’en a plein la bouche au bout de 5 minutes. Espérer. Oui. Maintenant un grand et sonore « OUI ».

Elle écrivait aussi. « T’en penses quoi ? » me demandait-elle « Je suis mauvais prêtre ». répondais-je. Allons boire un coup et manger de la bavette dis-je.

Lyrine était riche, ses parents étaient morts et lui avaient laissés une bonne tranche de fric.

Donc vers 13 heures on allait au Peintre, je serrais les mains, « Salut Enzo », « Tu vas bien ? » ; les serveurs me connaissaient. Louis Garrel passait en scooter. On s’en foutait, on s’en contrebalançait. Unique médaillon de notre union fut d’espérer ensemble des sauces au poivre. Je n’étais pas quelqu’un, avec elle j’étais La Personne à qui on suce le foutre de la poésie. Je l’impressionnais. Moi je chantais ses louanges avec une guitare. « Oh toi qui suce si bien, oh toi qui me tues avec tes jambes dorées, pourquoi choisir le dernier éléphant sur cette planète ? »

Un jour, c’était un dimanche, je n’avais pas pu m’acheter mes bières. Elle me dit tout à trac « Il faut, il faudra que tu rejettes loin toutes ces allégresses… Que tu répondes au grand géomètre ». Je ne captais pas. « Au jours il va falloir que tu publies » Point Enzo.

Je n’en avais rien à foutre d’être publié. Moi c’était juste le poinçonnage de 5 heures du mat à 9h de plus qu’écrire, transposais la chose matérielle en notion pure.

Mais elle insistait. Elle avait un lointain cousin éditeur à « La découverte ». Nous y allâmes.

Il lut. Puis redressant ses yeux vers moi me dit « Bah c’est pas mal tout ça ». Lyrine me fît un coup de pied. Puis il dit « Malheuresment on ne publie pas ce genre de truc ». Tout tombait dans le réel je savais qu’il n’y avait plus rien de réel là-dedans. De réel qui prend la tronche et fini aussitôt qu’il a commencé à apparaître dans l’espace-temps. Nous rentrâmes.

« Dommage, merde, dommage » dit Lyrine. 

Un jour que j’éjaculais enfin dans sa bouche elle eut l’idée géniale de me recracher mon foutre à la gueule. « Alors t’en dis quoi de ça ? » dit-elle. Je ne répondais « Pas grand-chose ».

Ç’avait pas de goût. Je me rappelais à 12 ans quand j’avais goûtais mes premières gouttes de sperme. Et déçus je me nettoyais la bouche avec une serviette.

Lyrine me quittât quelques mois plus tard. Pas d’enfant. Plus de musique douce.

Et je revenais à mes 8.6 après avoir écrit le matin.

J’avais aimé Lyrine.

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