Recueuil : La bouche ouverte
1.
j’écho le poème
puits sans nombres
sinon la profondeur
et je suis beau
puisque la révolte consiste à regarder la rose jusqu’à s’en pulvériser les yeux
2.
sept fois
le dieu au secret blessé
s’est imaginé fini
Ou
sept fois
le dieu au secret serré
s’est imaginé fini
3.
je suis assis dans l’ombre
le ciel a des yeux
au plus profond du savoir
je suis debout dans la poussière
rien n’arrive
dans ce monde vierge
le blanc
reste à vif
4.
Le soudain. À Sabrina
La très haute langue de l’insomnie
navigue dans les ports
ta peau rauque s’exténue dans ma poésie
et je soulève soudain mon corps
pour te retrouver là
si peu de vision
pour un haut et large mat
fuite des intelligences
rivière folle
5.
je tourne sans relâche
jusqu’à enlacer l’Univers
et ma bouche ouvre le Temps
et mes bras ferment le Temps
je tourne sans relâche
héroïne libidinale
je mange cette prison
pour la poser dans mon cœur
6.
lecture de l’immeuble
7.
tant de mots pour trembler juste
accent irrévélé
8.
ma nuque se casse mille morceaux d’amour
l’extension du mot c’est la pointe
la dérive des blocs
9.
l’image que nous permet de voir l’image qui nous permet tout
dans ce tout cette fenêtre un précipité se dégage : une nouvelle école
de nouveaux parents de nouveaux amours
un gouffre se donne en mes yeux
10.
Hommage à René Char
« Juxtapose à la fatalité la résistance à la fatalité. Tu connaitras d’étranges hauteurs »
Nul grille ne s’y oppose. mon rire est large comme le monde et mes amis ont des langues industrielles
11.
Le vent commence par souffrir
12.
qui peut se dire heureux ou malheureux avant de mourir ?
13.
le thème
le fenêtre
le contre-jour
14.
mes haches sont des dents
l’ampoule qui me sert de langue
est une dague
mes haches sont des dents
où poursuivre le poème
est une tentative de souffle
mes haches sont des dents
où poursuivre le poème
est une tentative d’holocauste de la mâchoire
mes dents sont des haches
pour dévorer l’imaginaire
ma poésie reste claire
15.
il a appliqué la peau
elle a collé comme il fallait
le nerf s’est levé, c’était un serpent vide
un espace neuf
l’œil plus qu’œil : une once de
violence
il a appliqué la peau
et tout s’est raréfié
même l’élan noir
16.
l’étroit désert
des mains seules
parcourues de sables noires
la coïncidence d’un sexe dressé
dans l’espace ouvert
une entité utile termine la poussée poétique
et l’action du poème se fait habiter
par un autre mouvement
la bandaison blanche
17.
une histoire chaude
éclot dans ma main
une histoire japonaise
qui brode et coud
les différentes pulsations
de la membrane de l’œil
plongé dans le chaos sempiternel
de la chaise
18.
j’appuie sur la veuve
une goutte de plus la traverse
et par ses os je me souviens des
notes de la malheureuse musique
de la perte
19.
en dehors du ciel
un amer rivage
là où point le visage
du sourire, du miel
et s’épanouit la poésie
dans la rondeur des années
se scrutent du grand paradis
tous les cadavres terminés
20.
Personne
le travail rend libre : envahit par la pudeur l’être se consume dans un voile de négatif. je cherche un être en moi à pester à prendre et retourner. je cherche à te parler toi qui m’a troué de ton amour. je suis ton mort tout craintif de l’aube. le soleil montera et je me baisserai pour ramasser le galet d’être brûlant. et je ne le jetterai pas, je le laisserai sur le bord de la fenêtre de Personne pour qu’il m’envahisse à son tour. pour qu’il m’en perce les veinules. je resterai attentif.
je resterai dans cette salle de cinéma avec toi : nul silence mais ici des phrases
nous serions alors tous les deux des
animaux blancs ?