À ma mère. Janvier 2018
Ne touche pas les morts
Même s’ils pleurent
Ils sont inconsolables
Et tu le sais bien
*
Les feuilles sont tombées
Lorsque je suis né
Restaient deux marronniers fragiles
Et je vous aimais sans le soupçonner
Vous souteniez un monde
Le monde peut-être
*
Tu avais l’âge que j’ai aujourd’hui
Tu étais ceinte d’une couronne d’or
Et armée d’un majestueux glaive
*
Pourtant tes feuilles manquaient
Les marrons pourrissaient par terre
Comme ceux des allées de Sainte-Anne
Il n’y a pas d’image pour décrire
Il n’y a pas de mot pour penser l’origine
Et je jette un caillou dans le puits
Et attends désespérément le bruit qu’il pourrait provoquer
*
Dans les années et les secondes
Tu m’as donné ton glaive
J’ai écrit
Aussi, tu m’as donné la couronne lumineuse d’un grand-père
Et de son obscur et pourtant pénétrant souvenir
Peut-être sans le faire exprès
Mais l’acte, par un heureux hasard a été commis
Et ceci est indescriptible
*
Tu m’as appris à faire ce qui comptait pour moi
Et voilà le printemps
Comme un poème qui connaît le silence des choses
*
Lorsque je mourrai
Le vent sifflera encore
*
À ta mort je coudrai l’étrangeté de
Ce qui participe à moi
En moi
Et au silence
*
Quelque chose comme un bruit
Un bruit de caillou qui tombe dans l’eau
Se fera finalement entendre
Il sera l’heure pour moi d’imaginer des transparences
Pour y voir plus clair
Pour t’aimer comme on aime un caillou
Un nuage
Avant d’aimer la vérité
*
Quelqu’un a fait sonner un mot
Trop tard peut-être
Mais le bruit fut exact sans nul doute.